Un mariage pluvieux à saint Palladius Church
- Angélique Provost
- 13 mars
- 2 min de lecture
On l’entend avant même de sortir de la voiture, cette pluie fine et insistante qui caresse les pierres sombres, glisse le long des vitraux et s’égoutte lentement sur le porche de Saint Palladius. Une pluie d’Écosse, familière et immuable, métronome rigoureux.
À l’intérieur, il fait chaud. L’encens s’attarde dans l’air épais, mêlé à l’odeur de la cire fondue. Une lumière hésitante filtre par les vitraux, et l’on devine, dehors, le souffle des averses sur les dalles anciennes. Les regards se croisent, un froissement d’étoffe, une main posée sur un bras.
Et puis la sortie. L’air vous pique au visage, vif et humide. On hésite sur le seuil, on rit sous les capes trempées, on jette un regard au ciel en haussant les épaules. C’est un mariage d’Écosse, après tout. On retrouvera la chaleur plus tard, dans l’éclat du whisky ambré et le pétillement du champagne. Pour l’instant, on marche sous la pluie, on se serre sous les parapluies qui ploient sous les rafales.
Le château de Drumtochty est là, posé dans la brume comme un décor de conte. À l’intérieur, l’attente est douce. Les verres patientent sur les plateaux d’argent, la musique du quatuor flotte dans l’air épais. On se retrouve, on s’embrasse, on me demande de figer l’instant. J’ajuste mon appareil, je cherche la lumière sur les visages, cette lueur fugace entre la joie et l’étonnement de la fête. On se parle d’un ton plus bas, comme si l’on voulait retenir la magie qui s’installe lentement.
Et puis vient la question : où faire les portraits ? Dehors, la pluie redouble. On hésite, on pèse les options. Mais pourquoi chercher à l’éviter ? C’est elle qui donne à la lande cet éclat si particulier, ce vert profond qui n’existe qu’ici. Alors on sort, un peu bravache, un peu insouciant. La pluie s’invite sur les tissus, laisse des perles fines sur les cheveux, offre aux époux une photographie qui n’appartient qu’à eux. Loin des mariages du Sud, loin des ciels bleus trop attendus. Ici, la beauté est autre. Plus vraie, plus sauvage.
Et le soir s’étire dans l’éclat des chandeliers. Un baiser entre deux plats, des rires qui roulent comme une musique ancienne. On oublie la pluie, ou peut-être l’aime-t-on un peu plus, maintenant qu’elle bat les fenêtres et fait scintiller les vitres du château. Plus tard, un feu d’artifice troue la nuit, comme un éclat de soleil volé au ciel d’Écosse. Et dans l’aube brumeuse, quand le dernier verre sera posé et que la dernière bougie aura vacillé, les fenêtres de Drumtochty veilleront encore, témoins d’une nuit qui ne voulait pas finir.
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